L'automne est doux, le ciel lyonnais clément. Les vélos orange du Grand Lyon, pratiques pour sillonner la ville, zigzaguer sur les trottoirs, suivre les quais du Rhône ou de la Saône, rejoindre les sites où se donne en spectacle le « quotidien » perçu par les artistes contemporains selon la thématique de cette dixième biennale.
Les chapitres définis par Hou Hanru, commissaire de la biennale ( La magie des choses, L'éloge de la dérive, Vivons ensemble et Un autre monde est possible) se mélangent dans les espaces d'exposition.
Dans le quartier de la confluence, La Sucrière et ses silos : GAUCHE/DROITE souligne Rigo 23, pléonastique.
Dehors, le long du quai, les péniches très artistes , manifestent une esthétique tout à la fois minimaliste et additionnelle. Art de vivre de bric et de broc. Humanité et poésie d'un bricolage, d'un assemblage.
Magie des choses, à l'entrée de l'expo, le demi-portail rageur de Shilpa Gupta frappe le mur qui le supporte à grands coups de boutoir, dans un bruit insupportable.
Plus loin Barry Gee, fait l'éloge de la dérive, en installant des camionnettes taguées ; l'art urbain du graft est mis en scène .
Un autre monde est possible pour Pedro Reyes avec des pistolets contre des pelles à tous les râteliers.
Carlos Motta taille au laser des slogans de lumière dans un mur noir
Agnès Varda, pour ce même chapitre, imagine des cabanes si légères que le loup n'aurait pas beaucoup à souffler pour les balayer : celle de la plage enchâlée de toiles et de cordages, celle aux portraits d'hommes et de femmes, celle de cinéma faite de pellicules 35 mm avec leurs toutes petites images, mémoire en lanières des films qu'on a aimés.
Et puis des choses surprenantes en vrac : des mots rouges qui ruissellent de plus en plus denses dans un bruit de cascade, dans la nuit d'une salle jusqu'à l'ensanglanter totalement.
Des os de porcelaine peinte en bleue, rangés dans des casiers de bois superposés, entre Cold case et vanités, de Yang Jiechang
Des photos de ville où une femme se promène bras dessus bras dessous avec un homme réduit à sa charpente, ou promène des squelettes de chiens en laisse, d'autres où l'espace public de la route est investi pour des actes quotidiens et intimes.
Des intérieurs inquiétants
Et surtout à l'entrepôt Bichat, l'installation des néons de Pedro Cabrita Reis qui dessinent l'espace de l'entrepôt, jouent avec la lumière naturelle , tremblent dans les flaques des dernières pluies, soulignent le montant d'une machine abandonnée, flottent ou se posent à même le sol, épées de jedi invisibles. Modestie du matériau, force de la trace, du trait.